La cote R et le camionneur

C’est le salut d’un camionneur qui m’a inspiré ce texte. Derrière son volant, il est en mission jour et nuit. Il doit se rendre à destination, son chargement va nourrir une partie de la population. Il n’a jamais été aussi attendu, son travail n’a jamais été autant reconnu et respecté. On a besoin de lui.

La cote de rendement au collégial (cote R) prédit la capacité académique de réussir dans un programme universitaire. Médecine, droit, optométrie, médecine dentaire et vétérinaire, podiatrie, physiothérapie, ergothérapie, nutrition, génie aérospatial et médical font partie des programmes les plus contingentés.

Pour plusieurs étudiants et parents, l’admission dans ces programmes est le point culminant de la réussite scolaire et sociale, déclassant ainsi tous les autres programmes de formation.

On en vient même à associer l’importance d’une profession à partir de la cote R. Malgré leur intérêt pour un domaine, certains étudiants hésitent à s’inscrire à l’université en physique, enseignement, administration, anthropologie, chimie, philosophie, environnement, se demandant si ces programmes sont aussi bons que ceux qui contingentés.  Ils en viennent même à dénigrer les programmes techniques et professionnels.

Non seulement les étudiants se servent de la cote R pour évaluer l’importance d’une profession et d’un programme, mais ils s’en servent pour se comparer et évaluer leur propre valeur personnelle. On voit alors apparaitre l’anxiété de performance, la compétition malsaine, l’isolement, la perte d’estime de soi et la démotivation. 

Il faut se rappeler que la cote R ne mesure pas la valeur d’une personne ni d’une profession et elle n’oblige pas, un étudiant qui réussit bien, à choisir un programme contingenté. La cote R est une méthode de classement des étudiants aux fins de la sélection des candidats à l'admission de programmes universitaires, dont seulement une vingtaine sont très contingentés sur les centaines de programmes disponibles.

Sortir de l’emprise de la cote R est difficile, car elle s’accompagne d’une pression sociale, mais c’est possible. Ceci implique de réfléchir sur le rôle qu’on veut jouer dans la société. C’est partir de ce qu’on aime, de nos forces, de notre personnalité puis choisir un domaine dans lequel on peut se réaliser pleinement.

En ce temps de COVID-19, notre regard sur les professions change pour nous faire réaliser qu’on a tous besoin des uns des autres. Camionneur, coiffeur, menuisier, préposé aux bénéficiaires, artiste, philosophe, minier, pépiniériste, politicien qui n’ont rien à faire de la cote R ; ils sont occupés, à leur façon, à préserver l’équilibre de notre communauté. Pour se sentir à sa place et être heureux, le rôle social et professionnel qu’on exerce devrait s’inscrire dans le prolongement de ce que nous sommes naturellement.

 
Chantale Desjaridns, conseillère d'orientation
Service d’orientation et d’aide à l’emploi

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